Lettre
ouverte à Madame Aurélie Filippetti,
ministre
de la Culture et de la Communication
Madame la Ministre,
Si
vous écoutez la radio publique, vous nous avez sans doute déjà
entendus. Nous sommes plus d’une centaine, journalistes précaires
de Radio France, disponibles toute l’année, susceptibles de
travailler de jour et de nuit, en semaine ou le week-end, pour les
chaînes de Radio France à Paris et pour les 43 antennes de France
Bleu en région.
Nous
remplaçons à la demande, et parfois en dernière minute, les
journalistes titulaires absents. Trois jours à Laval, une semaine à
Paris, puis, entre deux périodes de chômage, quelques jours à
Strasbourg ou à Quimper. Voilà un exemple de notre quotidien.
Vous
n’ignorez rien de la grande précarité qui touche un certain
nombre de salariés dans les médias. Mais connaissez-vous la
situation en détail ?
Savez-vous
qu’à Radio France, nous devons rester disponibles en permanence,
délaisser d’autres employeurs, pour attendre ce fameux coup de fil
qui nous enverra parfois à des centaines de kilomètres de chez
nous, pour quelques jours ou pour plusieurs mois ?
Savez-vous
qu’aucun d’entre nous ne connaît les conditions d’attribution
de ces CDD, dont la gestion est laissée à une seule personne ?
Savez-vous
qu’entre ces contrats précaires, nous devons batailler avec Pôle
Emploi pour nous faire indemniser ?
Savez-vous
que cette situation dure pour la plupart d’entre nous, depuis
plusieurs années – parfois plus de cinq ans – empêchant ainsi
toute stabilité professionnelle, affective ou familiale ?
Savez-vous
que rien, ni personne ne nous garantit qu’un jour, après tous ces
efforts et ces sacrifices, nous serons titularisés ?
Mais
au-delà de cette précarité, de ces incertitudes avec lesquelles
nous composons car nous aimons ce métier et cette entreprise, nos
conditions de travail et de vie se dégradent chaque jour un peu
plus.
Vous
avez demandé à Radio France de faire des économies. La direction a
promis de ne pas toucher à l’effectif humain. Pourtant, le budget
alloué aux contrats CDD a été le premier à baisser, dès le début
de l’année 2013. Et la baisse n’a rien de symbolique : - 8
% ! Quelle catégorie de population accepterait ainsi une baisse
de 8% de son volume de travail – et donc de salaire ?
Naturellement,
nous ne méconnaissons pas la situation des finances publiques.
Personne ne doit être exempté de l’effort commun. Mais quelle est
la pertinence de ces coupes budgétaires, puisque c’est in fine de
l’argent public, celui de Pôle emploi, qui complète –
partiellement - nos revenus fluctuants ?
Si
aujourd’hui, nous nous adressons à vous, c’est parce que malgré
nos tentatives, nous ne parvenons pas à obtenir de réponses de la
direction de Radio France.
Permettez-nous,
pour conclure cette lettre, de citer un responsable politique :
« Il faudra, dans l’audiovisuel public, requalifier en CDI
des contrats d’intermittents, de pigistes quasi-permanents ou de
CDD éternellement renouvelés. »
Vous
connaissez ces mots : ils sont les vôtres, dans un entretien au
JDD, le 21 avril dernier. Puissiez-vous, Madame la Ministre, passer
des paroles aux actes, et mettre fin à cet abus de précarité.
Dans
l’attente d’une réponse de votre part, nous vous prions
d’agréer, Madame la Ministre, l’expression de nos sentiments
respectueux.
Les
journalistes précaires de Radio France, collectif apolitique et
a-syndical.
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